Jayapura, Jubi – Le tribunal de Jayapura a poursuivi jeudi (11/5/2023) le procès de trois étudiants de l’Université des sciences et de la technologie de Jayapura (USTJ) accusés de trahison. Lors de l’audience, le procureur a présenté trois témoins qui ont dit que les trois accusés ont été arrêtés pour avoir manifesté avec le drapeau de l’Étoile du matin.
Les accusations de trahison portées contre Yoseph Ernesto Matuan, Devio Tekege et Amborsius Fransiskus Elopere étaient liées à un discours libre prononcé à l’USTJ le 10 novembre 2022. Lors de cet événement, ils ont brandi le drapeau de l’Étoile du matin pour rejeter le plan de dialogue de paix en Papouasie initié par la Commission nationale des droits de l’homme.
Les trois accusés de trahison ont été enregistrés auprès du tribunal de Jayapura sous le numéro 92/Pid.B/2023/PN Jap. (pour Yoseph Ernesto Matuan), 93/Pid.B/2023/PN Jap. (pour Devio Tekege), et 96/Pid.B/2023/PN Jap. (pour Amborsius Fransiskus Elopere). Le procès a été mené par un panel de juges présidé par Zaka Talpatty, avec Donald Everly Malubaya et Gracely Novendra Manuhutu comme membres.
Les témoins présentés par le procureur étaient le chef de la police de la station (Polsek) de Heram, Frengky Rumbiak, le membre de la Polsek d’Abepura, La Jamuali, et le vice-recteur III des affaires étudiantes de l’USTJ, Isak Rumbarar.
Dans son témoignage, Frengky Rumbiak a dit que le 10 novembre 2022, il avait été informé par ses hommes du discours public et de la levée du drapeau de l’Étoile du matin à l’USTJ. Vers 11 heures, il s’est rendu à l’USTJ.
Rumbiak y a vu environ 11 personnes qui manifestaient. Elles ont prononcé des discours en brandissant des tracts et deux drapeaux de l’Étoile du matin, et ont scandé « Papua » (Papouasie), ce à quoi on leur a répondu « Merdeka » (Libre). « Je les ai entendus faire des discours », a-t-il indiqué.
Rumbiak a ajouté que Devio Tekege et ses amis avaient été arrêtés pour avoir organisé une manifestation en portant le drapeau de l’Étoile du matin, parce que le port de ce drapeau est interdit par l’État.
« Ils ont été arrêtés parce qu’ils avaient hissé le drapeau de l’Étoile du matin. On ne peut pas créer d’État dans l’État », a ajouté Rumbiak.
Rumbiak a expliqué qu’il avait négocié avec le vice-recteur III de l’USTJ et les étudiants qui avaient organisé la manifestation pour qu’ils se rendent au bureau de Polsek d’Abepura. Rumbiak a précisé que les étudiants souhaitaient être interrogés afin que l’affaire puisse être résolue à l’amiable.
Cependant, les étudiants ont refusé cette demande. « On veut les amener au bureau de Polsek d’Abepura pour avoir une bonne discussion », a-t-il expliqué.
Rumbiak a raconté que pendant les négociations, des pierres ont soudainement été lancées depuis la porte du campus. La police a répondu à ces jets de pierres par des tirs de gaz lacrymogènes. Selon Rumbiak, les gaz lacrymogènes ont été tirés par des policiers de la police municipale de Jayapura.
« J’ai entendu des coups de feu tirés par la police de l’extérieur du campus. Puis j’ai vu des tirs de gaz lacrymogène. Le chaos a commencé par des jets de pierres et des tirs de gaz lacrymogène de l’extérieur du campus », a-t-il rapporté. Yoseph Ernesto Matuan, Devio Tekege, Amborsius Fransiskus Elopere et leurs amis ont ensuite été arrêtés et emmenés au bureau de police municipale de Jayapura, selon Rumbiak.
Interrogé par les avocats des trois accusés, Rumbiak a admis que l’utilisation du drapeau de l’Étoile du matin ne rendait pas nécessairement la Papouasie indépendante. Les actions des étudiants de l’USTJ n’ont pas non plus paralysé le gouvernement en Papouasie.
La Jamuali, membre de la Polsek d’Abepura, a dit que le 10 novembre 2022, on lui avait demandé d’aider la Polsek de Heram. Jamuali a indiqué qu’il avait vu un drapeau de l’Étoile du matin sur le lieu de la manifestation des étudiants de l’USTJ et que la police avait ensuite confisqué des tracts et des drapeaux de l’Étoile du matin aux manifestants.
La Jamuali a précisé que le chef de la Polsek de Heram et lui-même s’étaient coordonnés avec le vice-recteur III de l’USTJ et les étudiants qui organisaient une manifestation. Au milieu du processus de négociation, La Jamuali a vu des gaz lacrymogènes être soudainement tirés depuis l’entrée du campus. « Les gaz lacrymogènes ont provoqué le chaos », a déclaré La Jamuali.
La Jamuali a indiqué que le drapeau Morning Star était interdit par le gouvernement parce qu’il s’agissait d’un symbole de l’Organisation pour une Papouasie libre. Cependant, La Jamuali a également dit que les manifestations, les discours et le brandissement du drapeau ne rendaient pas nécessairement la Papouasie indépendante.
Un autre témoin, Isak Rumbarar, vice-recteur III de l’USTJ chargé des affaires étudiantes, a dit que les étudiants avaient organisé la manifestation sans envoyer de lettre de notification au rectorat. Il a expliqué que l’USTJ dispose d’un mécanisme spécial pour les étudiants qui souhaitent s’exprimer librement sur le campus.
« Il n’y a pas eu de notification à l’université. On a un mécanisme qui régit l’expression des opinions au campus. S’il y a des problèmes concernant la sécurité et l’ordre, veuillez-vous adresser à la Polsek d’Abepura », a-t-il indiqué.
Rumbarar a déclaré que l’USTJ n’avait jamais interdit aux étudiants d’exprimer leurs opinions, tant que cela n’interférait pas avec les cours.
Rumbarar a affirmé avoir contacté le chef de la police provinciale de Papouasie parce qu’il avait vu un drapeau de l’Étoile du matin porté par des manifestants. Il a ajouté que ce genre de choses ne relevait pas de l’autorité de l’université, mais de celle des forces de l’ordre.
« Si des étudiants sont ivres ou se battent, c’est l’université qui va s’en occuper. Mais concernant le drapeau de l’Étoile du matin, on ne peut pas s’en occuper », a-t-il confié.
Rumbarar a également affirmé que la police, les étudiants et lui-même avaient négocié. Au milieu du processus de négociation, des pierres ont été jetées entre les policiers et les manifestants. Rumbarar a fait savoir que les étudiants avaient jeté des pierres sur les policiers parce que leur ami était sur le point d’être arrêté.
Rumbarar a fait remarquer que pendant l’émeute, les étudiants ont fermé la clôture du campus parce qu’ils ont vu de nombreux autres policiers qui voulaient entrer dans la zone du campus. Rumbarar a essayé d’ouvrir la clôture du campus mais n’y est pas parvenu parce que la police a tiré des gaz lacrymogènes. (*)