Témoins experts de Viktor Yeimo : L’expression antiraciste et les demandes de référendum ne sont pas de la trahison

Viktor Yeimo
Le procès pour trahison de Viktor Yeimo au tribunal de Jayapura, lundi (27/3/2023). - Jubi/Theo Kelen

Jayapura, Jubi – Le tribunal de Jayapura a tenu lundi (27/3/2023) une nouvelle audience dans le cadre de l’affaire de trahison à l’encontre du porte-parole international du Comité national de Papouasie occidentale (KNPB), Viktor Yeimo. Lors de l’audience, les témoins experts présentés par l’accusé étaient le docteur Herlambang P. Wiratraman et le professeur docteur Cahyo Pamungkas. Les deux témoins experts ont dit que l’expression de l’antiracisme et la demande d’un référendum ne constituaient pas une trahison.

L’affaire de trahison présumée dont est accusé Viktor Yeimo est liée aux manifestations contre le racisme envers les Papous pour protester contre les insultes raciales proférées à l’encontre d’étudiants papous au dortoir des étudiants papous Kamasan III à Surabaya, le 16 août 2019. Yeimo a été accusé de trahison parce qu’il était considéré comme le dirigeant des manifestations qui ont eu lieu à Jayapura les 19 et 29 août 2019.

L’affaire a été enregistrée au tribunal de Jayapura sous le numéro 376/Pid.Sus/2021/PN Jap le 12 août 2021. Le procès a été présidé par un panel de juges présidé par Mathius avec les membres Andi Asmuruf et Linn Carol Hamadi (un nouveau membre du panel de juges).

Lors de l’audience de lundi, Herlambang, qui est professeur à la faculté de droit de l’université Gadjah Mada, a été invité à témoigner en tant qu’expert dans le domaine des droits de l’homme et de la démocratie. Il a indiqué que l’expression de l’antiracisme et l’expression politique demandant un référendum ne pouvaient être qualifiées de trahison, parce que cette expression était garantie par le droit indonésien et le droit international.

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Le témoin expert Dr. Herlambang P. Wiratraman témoigne dans le procès pour trahison de Viktor Yeimo au tribunal de Jayapura lundi (27/3/2023). – Jubi/Theo Kelen

Herlambang a rappelé que la liberté d’expression est un droit de l’homme protégé par l’État. Dans sa mise en œuvre, les droits de l’homme relèvent de la responsabilité constitutionnelle de l’État (le gouvernement) qui s’efforce de défendre les droits de l’homme.

« Cette obligation ou responsabilité est décrite en détail dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par la Loi n° 12 de 2005, qui réglemente la responsabilité de l’État de respecter, protéger et remplir les obligations concernant les droits de l’homme dans le cadre de la liberté d’expression », a précisé Herlambang devant le tribunal.

Herlambang a également déclaré que le racisme n’est jamais accepté dans aucune société. Il a souligné que les manifestations contre le racisme constituent une partie importante de la vie de la nation et ne peuvent être qualifiées de trahison.

« Aucune manifestation antiraciste n’est qualifiée de trahison, où que ce soit. Si les actes antiracistes sont punis, alors ils ne sont pas conformes aux normes des droits de l’homme », a-t-il affirmé.

Herlambang a également ajouté que l’expression politique pour l’autodétermination est un droit de l’homme. Elle fait partie de l’expression politique ou des convictions qui sont protégées par les systèmes juridiques nationaux et internationaux. « Il n’y a pas de violation de la loi dans la transmission de l’expression politique », a-t-il ajouté.

Herlambang a fait remarquer que l’expression par le biais de demandes de référendum, par exemple, est une forme de changement constitutionnel connue et reconnue dans la pratique de l’administration de l’État en Indonésie et qu’elle est une source de droit constitutionnel. Un référendum a également été organisé au Timor-Oriental le 30 août 1999 à l’initiative du président indonésien de l’époque, B.J. Habibie.

« La demande de référendum n’est pas une trahison car elle est faite démocratiquement. Elle est aussi une expression garantie par le droit indonésien et international. L’expression politique ne peut être associée à la trahison. Je ne peux pas imaginer ce qui se passerait si l’expression politique était liée à la trahison, comme l’a fait Viktor Yeimo », a expliqué Herlambang.

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Le témoin expert, le professeur docteur Cahyo Pamungkas témoigne dans le procès pour trahison de Viktor Yeimo au tribunal de Jayapura lundi (27/3/2023). – Jubi/Theo Kelen

Le professeur docteur Cahyo Pamungkas, qui a été présenté comme un témoin expert sur la résolution des conflits en Papouasie, a rappelé que les efforts juridiques contre les responsables des manifestations contre le racisme ne résoudraient pas le conflit en Papouasie. Selon Cahyo, cela ne ferait qu’accroître l’enthousiasme du peuple papou à poursuivre la lutte, parce qu’il se méfie déjà du gouvernement indonésien ou qu’il lui en veut.

« La procédure judiciaire engagée contre les responsables des manifestations va créer de nouveaux problèmes et renforcer l’esprit de lutte, car les personnes condamnées vont encourager les activistes de Papouasie à continuer à lutter », a dit Cahyo.

Cahyo a indiqué que l’approche juridique répressive ne résoudra jamais le problème de la Papouasie. Cahyo a ajouté que les quatre problèmes fondamentaux de la Papouasie, tels qu’ils sont décrits dans les résultats de la recherche de l’Institut indonésien des sciences (LIPI), doivent être résolus par le biais d’une approche fondée sur le dialogue. « Les quatre problèmes fondamentaux ne peuvent être résolus par des efforts juridiques, mais doivent passer par un dialogue pacifique », a-t-il ajouté.

Cahyo a déclaré que le conflit actuel en Papouasie, en tant que continuation du conflit passé, est une forme d’expression de la déception du peuple papou face à la distribution injuste des ressources, au développement qui n’atteint pas son objectif et à l’absence d’amélioration du bien-être des Papous.

Cette expression s’explique également par les diverses formes de violence politique subies par les Papous, notamment la stigmatisation des Papous en tant que séparatistes et les diverses formes de discrimination et de racisme. « L’expression de la déception se traduit par des manifestations », a-t-il affirmé. (*)

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